Pourquoi dans ma vie les mêmes épreuves reviennent sans cesse ?

26/03/2025

Les TCC, Franck Lopvet & les patterns mémoriels. 

Je suis face à une scène que je connais bien. Je suis agacée par les propos de l'autre, je me renferme. Je ressasse. La ville défile par la fenêtre. Mes yeux ne se posent nul part, je suis occupée à ressasser en boucle les mots, les expressions, la façon dont j'aurai dû réagir, ce que j'aurai dû dire. Je me coupe en me cloîtrant dans un silence assassin. Les jours qui suivent j'ai dû mal à digérer cette altercation. Décidément, je suis consciente du rapport de force qui se joue à cet instant dans notre relation mais je me persuade que ce n'est pas de ma faute mais bien de celle de l'autre. Il n'aurait pas dû dire ça, ou penser ça de cette façon. Ce n'est pas la première fois, que je me trouve dans cette voie sans issue. Ce genre de conflit qui mène chacun à maintenir ses positions.  Mais alors pourquoi donc ces patterns relationnels se présentent à répétition ? Ils m'enferment, me font souffrir mais je continue de réagir de la même façon que les fois précédentes.

Le triangle Pensée émotion - comportement

Notre façon de nous représenter le monde est composé d'expériences dont nous avons tiré des pensées, des sensations, des émotions et donc au fil de ces expériences nos comportements. A force de répétition nous apprenons à réagir de tel ou telle façon à une situation donnée en fonction du danger et des enjeux qu'elle représente pour nous. Ces patterns répétitifs sont étroitement lié au triangle cognitif également appelé le triangle pensée - comportement - émotion. Ces 3 composants interagissent et s'influencent de façon complexe. En thérapie comportementale et cognitive ( TCC ), le but est d'accompagner l'individu à agir sur 1 de ces 3 composantes pour améliorer sa situation. Soit par la pensée en changeant son point de vue sur une situation, soit en agissant sur les sensations et les émotions en étayant les perceptions dans une situation spécifique, soit en adoptant un nouveau comportement en agissant d'une façon différente. En modifiant une des trois composantes, c'est l'ensemble qui change son mouvement. Il s'agit donc d'une dynamique intérieure qui influence en profondeur notre rapport à l'extérieur. " Je ne peux appréhender le monde dans sa totalité, je ne vois qu'une face, et cette facette parle plus de moi que du monde" Franck Lopvet. 

Une émotion qui n'a pas pu s'exprimer dans le passé

Dans mon passé, je vis une expérience que j'ai perçu comme douloureuse, traumatisante, ne pouvant pas pour X raisons me laisser traverser par l'émotion associée, l'information stagne et s'imprime dans mon corps, mon esprit, ma mémoire cellulaire. Cette émotion n'est pas digérée, elle va se graver en moi et m'amener à adopter des comportements et des pensées associées à l'expérience que j'ai pu faire et des conclusions que j'en ai tirées. Cette émotion se cristallise. Alors que je crois voir le monde dans sa totalité, à l'ensemble de la réalité je ne suis face qu'à une sélection partielle de cette réalité, seule une part du réel pénètre ma conscience. Le regard que je porte sur le monde est conditionné par la peur de revivre cette souffrance antérieure ( là où l'émotion dite initiale est stockée ). Je ne suis pas consciente du fait d'être en rupture mais je développe des stratégies pour ne pas être amenée à me retrouver dans cette situation qui m'a auparavant blessée. Paradoxalement, pour veiller à ne pas revivre cette souffrance, je porte mon attention sur les potentialités de revivre cette souffrance. 

L'évènement initial reste en mémoire corporelle, psychique, émotionnelle, cellulaire. 

Et continue de se remanifester dans le présent avec sa charge émotionelle

 Dans le présent, j'opère une sélection de la réalité étroitement liée à la somme des expériences de mon passé. Mon système se concentre pour ne pas revivre la douleur antérieure, ce qui entraîne une hypervigilance à ce qui pourrait déclencher à nouveau cette émotion. Donc paradoxalement je ne souhaite pas revivre la souffrance donc j'anticipe les potentiels facteurs qui me ferait revivre cette émotion donc cela revient à chercher cette émotion dans mon quotidien. En essayant de contrôler les facteurs risques, je suis à l'affut des signes de sa manifestation. Si j'ai peur d'être abandonnée, je porte mon attention sur les potentialités d'être à nouveau abandonné. Hypersensbilité à cette thématique, on est plus suceptiable d'interpréter des faits de la vie quotidienne via ce filtre et donc finalement revivre l'émotion.

  • Le meilleur moyen de ne plus avoir peur d'être abandonné est de l'être, inconsciemment nous sommes amenés à rechercher cette expérience pour soulager, se délester d'une charge émotionnelle emmagasinée depuis des années. Cette charge résonne avec l'expérience vécue dans le présent et est l'occasion de ressentir, évacuer l'émotion, la blessure initiale. A force de vérification, de peurs nous allons être amenés à revivre pour soulager la tension que créer la peur.
  • Il arrive également que l'individu confirme à travers ces expériences une croyance comme dans cet exemple, les autres vont m'abandonner. Plutôt que de remettre en perspective le rôle, les marqueurs de son contrôle au sein de son expérience, il va rester " la bonne personne" et pointer du doigt les autres, coupables de son infortune.
  • Le bénéfice secondaire est immense, rester une victime, ne pas rencontrer l'émotion initiatrice qui lui est propre et personnel, continuer de garder un couvercle, une stature d'adulte, en gros avoir raison.
  • Lorsque nous faisons le choix de sélectionner une part de la réalité, cela va conditionner la façon dont nous prenons les choses.
  • On peut rester bloquer toute une vie, sur une émotion qu'on choisit de ne plus ressentir. "Plus jamais je ne serais trahi" parce que au fond "ca m'a été tellement insupportable et douloureux de l'avoir été".
  • J'aime beaucoup la façon dont Franck Lopvet cerne "l'égo humain" = en adoptant une position de victime, nous avons des "likes", nous sommes rassurés, réconfortés dans un personnage. Mais la réalité est elle si peu nuancée ? Il pose une question très intéressante, lorsque on enlève touts tes bourreaux, que reste t-il de toi ? Lorsque je travaillais sur cet article, j'ai aidé des amis à nettoyer leurs jardins. Une voisine s'est présentée, en quelques minutes elle m'a expliqué, qu'elle était veuve, diabétique, qu'elle se faisait griffer par les branches des ronces et tout ça sous couvert de faite bien attention à ne pas vous blesser mademoiselle. Elle incarne à cet instant "la bonne personne" qui veut se montrer attentive en justifiant le fait qu'elle souhaite de l'aide par le diabète ce bourreau, la solitude ce bourreau etc. Plutôt que de se montrer vulérable et demander si j'ai un peu de temps pour m'occuper des ronces qui dépasse dans son jardin, elle met en scène son "pathos" pour que j'ai pitié d'elle et que je la sauve de ses vilaines ronces. Au fond, j'ai de la compassion pour cette femme et cela me saute alors aux yeux la façon dont nous pouvons au quotidien passer par ce statut de victime pour obtenir la validation d'un récit qui nous est propre et dans lequel nous trouvons un moyen d'exister aux yeux des autres et insidieusement manipulé pour obtenir ce que nous voulons.